Cette
période couvre plus de deux siècles et voit se multiplier les sites tant dans
les régions anciennement occupées que dans de nouveaux territoires ; cela
traduit un accroissement démographique et une sédentarisation définitive de
la plupart des habitats, facilités par l'accroissement des rendements dû aux
progrès et à la généralisation des outillages agricoles comme l'araire, le
char et l'attelage (216) des bovidés.
Encore de nouveaux changements typologiques
A la fin du Xe siècle, sur le bord des lacs ou ailleurs,
les populations ont des habitudes techniques et culturelles totalement différentes
de celles qui caractérisent la civilisation de R.S.F.O à la
phase moyenne.
Ce phénomène est-il dû à de simples influences reçues du nord, à la "réactivation"
de traditions anciennes qui n'étaient qu'en sommeil ou bien à de nouveaux
mouvements humains ?
Dans ce dernier cas les arrivants auraient manifesté plus de capacité que
les R.S.F.O. à s'intégrer aux communautés existantes ; peut-être étaient-ils
de même origine "ethnique", de mêmes traditions religieuses que ceux qui étaient
arrivés dans les Alpes à la phase ancienne, au XIIIe siècle.
Dans les sites où s'était développé le faciès R.S.F.O. les éléments typiques
de la céramique s'effacent. Le sondage de Tougues (Chens-sur-Léman)
est démonstratif du changement complet dans la morphologie et la décoration
des vases entre la fin de la phase moyenne et le début de la phase récente
(217). Les nécropoles sont désertées avec
l'abandon du rite funéraire à incinération. Dans les palafittes, le sondage
de Tougues montre aussi une couche stérile de craie lacustre assez
épaisse séparant les deux dernières phases. Les couches
sus-jacentes offrent du matériel portant de nouveaux caractères.
Cette rupture se marque-t-elle aussi un abandon des stations littorales ;
outre le sondage de Tougues, une seule donnée actuellement le laisserait supposer,
c'est que l'emplacement des nouveaux villages est souvent quelque peu décalé
par rapport à celui des anciens (218), preuve
d'une reconstruction totale.
Les activités pourtant restent identiques, métallurgie et poterie, dans des
ateliers qui demeureront actifs jusqu'à leur disparition à la fin du IXe siècle.
Ultérieurement et pendant quelques siècles l'évolution des formes et des décors
des céramiques se fera lentement : beaucoup perdureront comme le montrent
les rares stratigraphies (219) qui ne révèlent
aucune rupture typologique. Il en sera de même pour les bronzes dont les formes
nouvelles apparues au début de la phase récente demeureront longtemps inchangées
(220), Seules de petites variantes apparaîtront,
dues à la multiplication des ateliers locaux (221),
variantes qui ne peuvent pas être finement datées la plupart ayant été trouvées
hors contexte archéologique.
Bien des bronzes attribués par leur forme à la phase récente ont donc été
produits postérieurement, au début de l'âge du Fer, suivant des
traditions et des procédés en usage à la fin du Bronze final. En effet, ce
n'est qu'au Hallstatt final qu'apparaissent les premières haches à douille
en fer (222).
Les Hautes-Alpes feront
preuve d'originalité avec la fabrication
de parures spécifiques à la région.
En résumé, beaucoup de matériel de type "fin Bronze final" persistera
au moins durant la première partie du premier âge du Fer, ce qui explique
la forte densité des sites attribués à la phase récente du Bronze final, dont
beaucoup seraient en réalité plus tardifs. La carte de répartition de la fin
du Bronze final est donc affectée par ces imprécisions et sera moins chronologique
que techno-culturelle.
Dans
l'avant-pays
Les villages lacustres occuperont parfois de grande
superficie (223) et on doit regretter encore
l'absence de fouilles d'envergure sur ces sites qui nous privent des éléments
dont disposent nos collègues suisses. Leurs productions coexisteront avec
celles des ateliers de bronziers locaux intégrés dans les communautés (224)
; par exemple les haches et herminettes à douille et à étranglement central
(225) sont absentes des productions lacustres
alors que leur diffusion, généralisée dans la moitié sud de la France, témoigne
d'une métallurgie alpine qui conserve une certaine originalité dans ses inspirations
et l'élaboration de ses fabrications.
L'influence des acheteurs alpins se retrouvent dans les productions du lac
du Bourget qui s'adaptent aux goûts régionaux. Les haches perdent leur caractère
galbé au profit de celles, plus massives, de la tradition locale (226).
Beaucoup de bracelets sont conformes à ceux en vogue à la fin du Bronze moyen
et au début du Bronze final (227) en évitant
certaines formes exubérantes et les décors trop riches (type de Saint-Genouph)
à la mode en Suisse. Les épingles à tête vasiforme, usinées au tour
et celles à enroulement spiralé sont très nombreuses bien qu'un peu moins
variées que celles des productions helvétiques.
La belle céramique issue
des ateliers palafittiques se retrouve (228)
rarement dans les gisements terrestres de la région où la gamme des formes
est toujours plus pauvre, la cuisson moins régulière et les décors moins variés.
Les productions lacustres sont-elles réservées à l'exportation lointaine (229)
? Les éléments chronologiques actuels ne sont pas assez précis pour le dire
et les analyses céramologiques manquent.
Haches à ailerons terminaux et à douille, couteaux à douille, épingles à tête
enroulée, parsèment le pays sans que l'on puisse savoir si l'origine en est
lacustre ou non, à de rares exceptions près (230)
; leur nombre indique que l'usage du Bronze se généralise.
Les bronziers, mêmes ceux des palafittes, connaissent bien les haches armoricaines et les copieront par "surmoulage" (231) ou en imiteront les reliefs bouletés et les faux ailerons, ce qui montre assez l'impact de ces pièces importées sur l'économie et les goûts locaux.
A la fin de la période,
au VIIIe siècle, à Fillinges
au sud du lac Léman, sept cuirasses du VIIIe siècle issues des ateliers du
Danube (?), et une autre à Grenoble révèlent-elles une présence militaire
liée aux "princes" ou aux premiers Hallstattiens ?
Des influences hallstattiennes apparaissent déjà à la fin du IXe siècle, aux
Gandus à Saint-Ferréol-Trente-Pas (232) et
les grottes du Diois ne sont pas avares en céramiques de cette époque (233).
Un bracelet du dépôt haut-alpin de Bénévent-Charbillac est en bronze au plomb
(9%) et nous avons vu que bien des pièces du même âge ont une concentration
en plomb supérieure à 0,8%. Ce phénomène débute dès la phase moyenne dans
les Alpes (ce qui est inhabituel en Europe) et s'amplifie à la phase récente
où les objets à faible teneur en plomb sont exceptionnels; le plomb remplace
une certaine part d'étain dont la quantité diminue dans les bronzes par rapport
aux périodes antérieures ; ce phénomène est général en Europe. Mais le plomb,
s'il fluidifie aussi bien que l'étain le métal à la coulée, ne procure pas
au bronze, et de loin, les mêmes qualités mécaniques.
Dans les massifs internes
A cette période, la conquête des Alpes internes s'intensifie
: elle atteint l'Oisans, en Dauphiné, jusqu'alors pratiquement ignoré (234),
et s'affermit dans les vallées du Guil et de l'Ubaye, en Maurienne et en Tarentaise
en colonisant les bassins latéraux (235).
Bien que l'on ait peu d'objet et pas de vestiges d'habitat, les pollens de
la tourbière de Valloire en Maurienne, à 1800m, vers 800/700 BC traduisent
cette extension du peuplement par des déforestations.
Les contacts avec l'Italie
du Nord
Ces contacts se poursuivent
au IXe siècle avec divers objets villanoviens
(236) en provenace d'Emilie ou d'Etrurie, les décors anthropomorphes sur
céramique et les swastikas au lac du Bourget. On remarquera la grande diffusion
de la mode des épingles, qui abondent au nord et à l'ouest des Alpes mais
aussi en Italie du Nord où les tombes en récèlent beaucoup, dès le début du
Bologna I (début du IXe siècle) jusqu'au VIIe siècle ; ici la variété des
modèles étant moins grande qu'en Suisse ou en France, il est probable que
l'inspiration en arrive de ces régions.
Le lac du Bourget a livré un des plus anciens fers façonnés en France (237),
bien daté d'avant le VIIIe siècle ; l'origine en est-elle l'Italie ou l'Europe
moyenne ?
L'abandon des stations
littorales
La disparition des stations littorales des lacs et des
rivières est un phénomène qui affecte l'Europe moyenne et occidentale dont
la significa-tion historique n'est pas considérée à sa juste valeur, probablement
par l'incertitude de ses causes.
Depuis le siècle dernier la couche supérieure de ces sites, datée de la fin
du Bronze final, a livré aux ramassages et aux fouilleurs une abondance étonnante
de céramique et de métal ; l'eau les a recouvertes suffisamment vite pour
que bois et matières périssables y soient conservés.
Abandon pour des raisons climatiques ?
Dans le passé l'explication la plus souvent avancée était qu'une forte péjoration
climatique avait fait monter le niveau de l'eau, très rapidement et définitivement,
obligeant à l'abandon ; dans ce cas pourquoi la richesse constituée par les
bronzes a-t-elle été laissée sur place ? Cette hypothèse parait aujourd'hui
peu réaliste : les dates dendrochronologiques des derniers pieux plantés dans
les différentes stations ne sont pas identiques, avec des différences qui
atteignent plusieurs décennies entre la Savoie et la Suisse occidentale, ce
qui élimine la contemporanéïté d'un phénomène climatique généralisé (238).
Certes une dégradation climatique existe bien, celle du stade Goeschen I A,
qui marque le début du Sub-Boréal expliquant la montée des eaux, mais ce n'est
que vers -790 que les chênes européens commencent à souffrir d'anomalies de
croissance, d'après les dendrologues, c'est à dire peu après, mais toujours
après les derniers abandons d'après les données actuelles (-809 dates du pieu
le plus récent daté à Tresserve (238bis)),
c'est à dire quelques années plus tard.
Prenons l'exemple de la disparition aux XIVe/XIIIe siècles des habitats terramaricoles
de la plaine du Pô ; les auteurs italiens qui en voyaient aussi la cause dans
les changements climatiques, penchent aujourd'hui , comme le dit A.Cardarelli
pour "une explication d'ordre historico-politique et/ou un facteur de crise
et d'instabilité interne sur le plan économique et social". Cette fin
correspond d'ailleurs à un déplacement sur les sites défensifs de hauteur
et les "castellieri" deviennent nombreux dans les vallées piémontaises,
comme un repli vers des régions naturellement protégées.
Abandon pour des raisons
politiques, économiques ?
Pour les Alpes aussi d'autres motifs que climatiques
doivent être envisagés pour expliquer l'abandon des stations littorales à
la fin du IXe siècle. Des traces d'incendie (239)
font penser à des actions violentes qu'expliqueraient des raids destructeurs.
Le processus serait alors comparable à ce que les Vikings ont fait subir pendant
le IXe siècle à l'Europe de l'Ouest avant leur implantation dans des territoires
conquis ou concédés. On peut envisager des luttes entre "chefs ou princes"
se disputant la possession du pays, des fabrications ou des marchés ; ce peut
être aussi les premières incursions des cavaliers hallstattiens vers l'ouest.
Les traces archéologiques de ces raids sont toujours difficiles à reconnaître
et seuls les textes sont à même de nous renseigner avec quelques précisions
sur ceux des Normands du Moyen-Age.
Ainsi se justifieraient les décalages chronologiques constatés dans les abandons
entre Suisse et Savoie et aussi se comprendrait mieux le déplacement du peuplement
vers des zones de refuge à l'intérieur des massifs centraux et dans les Hautes-Alpes,
moins accessibles que le piedmont et aussi plus faciles à défendre.
Ces temps troublés auraient incité à l'occupation temporaire de très nombreuses
grottes, souvent élevées au-dessus des vallées ; pratiquement il n'existe
pas de cavités, même de faible dimension, autour et souvent à l'intérieur
des massifs calcaires qui ne recèlent pas quelques tessons attribuables à
la fin du Bronze final, traces de séjour plus ou moins prolongé. Doit-on à
la même cause les enfouissements de dépôts qui ne sont pas des "trésors" de
bronziers (240), comme aux périodes
précédentes, car ils ne comportent que des outils ou objets
entiers ?
Pour se résumer, péjoration climatique débutant peu après un abandon plus ou moins volontaire des ateliers littoraux. Cette dégradation, s'accompagnant d'une montée des eaux rapide, aurait empéché toute réinstallation ultérieure,
L'organisation du territoire,
occupation des sites de hauteur et les "princes"
Il est impossible de dater avec précision l'installation des places fortes
dominant les voies de passages (241) et c'est
regrettable car il serait bon de savoir si elle correspond, ou non, aux abandons
des stations lacustres. Ces oppidums sont installés sur les voies stratégiques
traduisant ainsi autant la prise de possession et le contrôle du territoire
que la nécessité de se protéger d'incursions destructrices.
Une classe dirigeante concentre son pouvoir en organisant politiquement et
commercialement les communications et l'espace alpin, ce qui ne va pas forcément
sans heurt ni sans confrontation d'intérêts.
L'exemple le plus spectaculaire en est donné par l'oppidum de Larina à Hières-sur-Amby
près de gués sur le Rhône en nord Dauphiné, que l'on peut considérer comme
une "résidence princière" liée à la nécropole de tumulus de Saint-Romain-de-Jalionas,
dans le style des futurs "princes hallstattiens" qui émergeront
au VIe siècle.
La plus riche des tombes,
datée du VIIIe siècle, témoigne de la richesse comme de la position sociale
du défunt (242).
Dans la fertile plaine de Bièvre-Valloire entre Isère et Rhône, dont les découvertes
sont encore rares (243), à la Côte-Saint-André
les restes d'un char à quatre roues
de bronze coulé conservaient une jante en chêne datée de -735/-725, remplaçant
celle que l'on sait avoir été posée auparavant ; il y avait
donc ici aussi un "prince" dès la fin du IXe siècle (244)
dont il reste à trouver l'oppidum au carrefour de l'axe est-ouest de Bièvre-Valloire
et celui nord-sud reliant la basse vallée de l'Isère à Bourgoin (245).
Selon des hypothèses récentes ces princes domineraient une région bien déterminée.
Le début du contrôle des axes transalpins est confirmé par quelques tumulus
placés entre Buech et Durance (246) semblant
liés à une aristocratie, riche sans être forcément princière, installée sur
la route du Montgenèvre dès le VIIIe siècle et que les deux siècles suivants
verront croître et prospérer sous la domination hallstattienne.
Le pied des Alpes du Nord possède des tombes à statut princier qui sont parmi les plus anciennes de France, rattachées à un vaste ensemble centré sur le nord-est de la France, ce qui est assez significatif de l'importance stratégique et commerciale de cette région dans le cadre de l'aménagement l'Europe occidentale.
Art et religion
Des vases et des coupes du site de Moras-en-Valloire en bas
Dauphiné, datables de la fin du Bronze final, sont décorés
d'in-
cisions figurant des chars attelés, croix, swastikas, anthropo-
morphes, frises de danseurs et signes géométriques. Le même
type de vases trouvés à Saou, en Diois, portent des signes
assez semblables mais dans un registre moins étendu, toujours
en contexte archéologique identique.
La station de Chatillon, Chindrieux, sur le lac du Bourget pos-
sède une coupe bien connue avec une frise de danseurs obtenue
par de fines lamelles d'étain, malheureusement sans position stra-
tigraphique connue (247) ; des tessons incisés
de chars ou d'attelage
proviennent de Virignin en rive droite du Rhône dans le défilé de Pierre-Châtel.
A Sérézin-du-Rhône, près de Vienne, une frise de danseurs gravés orne un plat
dont la céramique associée date de la fin de la phase moyenne (BF IIIa) ce
qui situe le début de cette pratique.
De nombreuses études admettent que cet art sur céramique, largement répandu
dans le couloir rhodanien, le Midi méditerranéen (248)
jusque dans les Charentes et le centre de la France, se développe entre le
Xe et le VIIIe siècle. Quelques motifs, swastikas, cercles concentriques et
anthropomorphes, comme celui du méandre plus largement utilisé, ne sont probablement
pas sans rapport avec les décors villanoviens et les chars évoquent les gravures
rupestres du Mont-Bégo ou du Val Camonica (249).
Quadrupèdes, anthropomorphes, swastikas sénestrogyres, cercles concentriques,
zig-zag incisés sur céramiques, semblables aux motifs alpins et d'inspiration
villanovienne, existent sur certains vases Golasecca datés par nos collègues
italiens du Golasecca II, donc plus tardifs.
Les petites figurines modelées
en terre cuite du lac du Bourget sont soit anthropomorphes (250),
soit zoomorphes (251). C'est dans la station
du Saut à Tresserve que les ramassages du siècle dernier ont récolté la quasi
totalité des figurines anthropomorphes extraites du lac alors que les recherches
se sont développées de la même façon sur tous les sites : soit c'est le fait
du pur hasard soit plus probablement existait là une structure spécifique
à caractère "religieux" ou un centre de fabrication.
La tradition des statuettes d'animaux domestiques remonte au XIVe siècle en
Hongrie (Civilisation de Hatvan) et elle s'est vigoureusement implantée
dans les Terramare d'âge proto-villanovien du XIIIe au Xe siècles en Italie
du Nord. Sur le versant italien, le pied des Alpes en possède ainsi que les
palafittes suisses (252).
Les vases-pygmée trouvés en abondance sur le lac du Bourget, copies en miniature
de toutes les formes alors en usage, sont aussi une tradition qui remonte
aux Terramare. Statuettes zoomorphes et vases-pygmée seraient issus de l'influence
directe de l'Italie du Nord.
Les figurines anthropomorphes, plus rares en Italie (Reggio Emilia) avant
le Villanovien final pourraient venir de la région de Cumes en Italie centrale
; leur diffusion est plus restreinte que les zoomorphes et elles existent
en Champagne et en Ardèche (253).
Ces représentations sont supposées être à vocation religieuse comme les plaques
de foyer-autel domestique en demi-cercle, ornées d'ocelles et de swastikas
estampés provenant de Grésine à Brison-Saint-Innocent et que connaît l'Italie
centrale. De tous ces documents il ressort que des influences méridionales
et italiques se font nettement sentir dans le domaine artistique ou religieux,
en particulier au lac du Bourget dont
le rôle ne devait pas seulement être commercial et technique.
Là en effet se rejoignent les traditions centre-européennes avec les rouelles
et les roues de char votif et le rituel des foyers-autels domestiques de provenance
méditerranéenne.
Les rites funéraires
de l'âge du Bronze final
- Les tombes de la phase ancienne du Bronze final sont en inhumation plate,
en plein air à Petit-Coeur en Savoie et Crémieu, en grotte à La Balme-les-Grottes
ou en fissure de rocher à Fontaine (254)
ou à Parmilieu (255).
L'inhumation simple et l'incinération en urne coexistent dans le cimetière
de Douvaine près du lac Léman ; seul de son espèce dans les Alpes du Nord,
sa durée fut assez longue couvrant les phases ancienne et moyenne du Bronze
final ce qui explique la présence des deux rites funéraires.
Bien que non funéraire, il faut citer le dépôt votif d'un vase accompagné
de céréales et de noisettes caché dans une niche, à l'entrée d'une résurgence
au coeur du Vercors (256).
- A la phase moyenne ce sont des incinérations en urnes, soit en plein air
(257) soit en grottes (258)
que nous considérons comme des "Champs d'urnes" souterrains où les ossements
calcinés ne sont pas faciles à déceler mais toujours avec une grande quantité
de vases d'offrandes. Selon certains, la grotte de Sollières n'était qu'une
réserve de nourriture à cause de l'abondance des vases grossiers mais d'énormes
quantité de suie grasse atteste des crémations ; dans tous les
gisements cités comme funéraires les récipients grossiers sont toujours nombreux,
mêlés à la vaisselle funéraire fine comme les gobelets à épaulement ou les
plats, jamais aussi abondante dans les habitats (259).
Dans ces nécropoles, à la Balme-les-Grottes en particulier, les urnes n'étaient
pas enfouies mais disséminées dans les recoins des cavités, ce qui a facilité
leur destruction à une époque
inconnue mais certainement ancienne ; c'est la raison pour laquelle il n'a
pas été trouvé de bronzes (260). Seule la
zone funéraire de Sollières, placée au pied d'une diaclase, n'avait pas été
violée.
Ces cimetières en grottes sont bien connus dans le Languedoc (261).
L'utilisation funéraire des fissures de rocher, comme des grottes, à un stade
avancé du Bronze final reste conforme à une vieille pratique alpine... Dans
les hautes vallées de l'Isère et de l'Arc, incinérations et céramique R.S.F.O.
traduisent la pénétration de nouvelles populations sur les voies transalpines
et près de gîtes de cuivre (262), portant
avec elles leur mode funéraire.
- A la phase récente du Bronze final, les rares inhumations connues
sont simples (263) et malgré l'importance
des stations littorales il n'a pas été trouvé de cimetière dans leur voisinage
(264), comme cela a été le cas en Suisse. Le tumulus réapparaît au nord
du Rhône, en Bresse et nous avons parlé de ceux de Saint-Romain-de-Jalionas
et de Chabestan au confluent Buech-Durance qui traduisent le contrôle de territoires
et/ou des voies commerciales au VIIIe siècle.
Les sépultures en fosse de jeunes enfants sous le niveau d'habitat de l'extrême
fin de l'âge du Bronze à la Balme-de-Thuy, Haute-Savoie et à Sainte-Colombe,
Hautes-Alpes traduiraient un rite funéraire d'installation.
Plaque de foyer-autel domestique, en terre cuite décorée de méandres, d'ocelles et de swastikas. Station de Grésine, lac du Bourget.