Les fouilles subaquatiques au sud du lac de Paladru, à Charavines, ont exploité, entre 1972 et 1986, deux petits villages qui se sont succédés, au même endroit sur la rive à la fin du Néolithique.

De nouvelles méthodes de fouilles très précises ont fourni de multiples témoins, très bien conservés, de la vie quotidienne et de l'artisanat en matières végétales, les modes culturaux, l'alimentation, la gestion des forêts et des données précises sur la chronologie et l'architecture des maisons par la dendrochronologie, etc.

Les villages
Une communauté de 40 à 50 personnes se fixera, en 2668 av. J.-C. , sur la rive près des forêts où dominent les sapins accompagnés de frênes, aulnes, hêtres, etc. Le premier village durera une vingtaine d'années. Un autre le remplacera, au même endroit, en 2611 av. J.-C., soit deux générations plus tard, pour une nouvelle et dernière occupation qui prendra fin vers 2592 av. J.-C.

Les ressources
Ce système d'habitat semi-permanent et cyclique s'explique par une agriculture de type horticole, pratiquée après brulis sur des terres lourdes et argileuses, au moyen de courtes pioches en bois de cerf, pour culture en sillon du blé dur, de l'orge, du coqueret, du pavot et du lin.

Ouverts sur une faible profondeur les sols se trouvaient épuisés rapidement. Quand le finage environnant n'avait plus un rendement suffisant pour alimenter le groupe, il fallait partir et reconstruire le village quelques kilomètres plus loin, au milieu de terres vierges ou régénérées par la végétation après un abandon antérieur.
À Charavines, les ressources de la forêt pour la chasse (50% de cerf dans l'alimentation) complètent l'élevage du porc, du mouton et de la chèvre ; la cueillette de fruits (pommes, noisettes, prunelles, mûres, etc.) était abondante et des fibres végétales servaient à la confection des vêtements et des liens (cordes, ficelles).
Ils possédaient une haute technicité dans l'artisanat de la céramique, du bois (fabrication de manches de hache, de cuillères, de peignes, d'épingles), de la vannerie (paniers), du textile (nattes, toiles et velours). Ces productions étaient à l'origine de richesses permettant de nombreux trocs.

Les villages n'étaient pas isolés
Ces villages échangeaient, souvent à très longues distances avec les autres communautés.
l'ambre de la Baltique, le silex du Val de Loire, les haches en roches vertes du Val d'Aoste ou du Piémont, une perle en cuivre et un grand vase du Languedoc, des vases de l'ouest de la France, une hache-marteau de Suisse occidentale… Des vases fabriqués à Charavines sont exportés dans le Jura et au bord du lac de Bienne en Suisse...
C'est l'importance de nos villages !

Le néolithique à Charavines
par Aimé Bocquet, responsable des fouilles et des études
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